Nihil et Totus sont deux personnages passionnés par les paradoxes du temps. Ils sont d'ailleurs au centre d'un ouvrage consacré à cette notion fascinante et intitulé "Les paradoxes du temps".
- Mon cher Nihil, je vais mettre ta sagacité à rude épreuve. Je vais enfin savoir si tu es doué pour autre chose que la critique. -J'ai le don du don! Parle donc.
- Je vais te présenter quelques problèmes d'apparence très simple. A toi de faire la part de l'intuition et du raisonnement.
1) - Imagine que je me rende de la ville A à la ville B à la vitesse de 60km/h et que je revienne ensuite de la ville B à la ville A à la vitesse de 120km/h. Quelle est la vitesse moyenne de mon trajet aller-retour?
2) - Imagine que je me rende de la ville A à la ville B à la vitesse de 60km/h. A quelle vitesse devrai-je parcourir le trajet retour de B en A pour atteindre une vitesse moyenne de 120km/h sur l'ensemble du trajet aller-retour?
3) - Imagine que nous voulions comparer les performances de nos voitures sur la distance de 1km, départ arrêté. Sachant que je parcours les 200 derniers mètres en 4" et que tu parcours les 250 derniers mètres en 5", lequel de nos véhicules est le plus performant?
4) - Imagine que je quitte la ville A à 12h et que je roule à une vitesse moyenne de 60km/h vers la ville B située à 120km. Pour ta part, tu quittes la ville B à 13h pour rouler à une vitesse moyenne de 120km/h vers la ville A. Au moment où nous nous croisons, lequel de nous se trouve le plus près de la ville A?
A quelle heure nous croiserons-nous?
5) - Peux-tu m'expliquer comment je peux me rendre de A en B en 1h30' et de B en A en 90' alors que je roule à la même vitesse moyenne à l'aller et au retour?
6) - Imagine que nous quittions au même moment, respectivement, toi le point B et moi le point A distants de 100km. Nous roulons tous les deux à la vitesse de 50km/h. Au moment du départ, une mouche a quitté le point B et se dirige vers moi à la vitesse de 75km/h. Au moment où elle touche mon pare-brise, elle fait instantanément demi-tour et vole vers toi et ainsi de suite jusqu'à ce que nous nous croisons. A l'instant où nous nous croiserons, quelle distance cette mouche aura-t-elle parcourue?
7) - Imagine la situation précédente. Au moment où nous nous croiserons, la mouche volera-t-elle vers moi ou vers toi?
8) - Inversons le temps dans la situation précédente et imagine que nous nous éloignions l'un de l'autre à partir de notre point de rencontre. La mouche reprend son vol de l'un à l'autre de nos véhicules. Au moment où nous aurons respectivement atteint toi le point B et moi le point A, où doit se trouver la mouche?
9) - Imagine que ton univers se résume à un élastique d'une longueur d'1km. Ta vitesse de progression est de 1m/s. Après chaque seconde, l'élastique s'allonge d'1km. Combien de temps te faudra-t-il pour en atteindre le bout, si cela est possible?
10) - Imagine deux horloges. L'une perd 1' chaque jour. L'autre ne fonctionne pas du tout. Laquelle de ces deux horloges donne le plus souvent l'heure exacte par rapport à une troisième horloge qui fonctionne elle tout à fait correctement?
11) - Se peut-il que le sommet de la roue de mon véhicule roule plus vite que sa base?
12) - Imagine que je t'annonce ta mort un jour de la semaine prochaine. Tu sais que je t'étriperai un jour de la semaine, mais tu es incapable de savoir lequel. J'ajoute un brin de cruauté au châtiment que tu mérites pour m'avoir raillé au fil des pages de ce manuscrit. Pourquoi souris-tu?
13) - Figure-toi que j'ai fait une rencontre surprenante. Deux amis d'enfance. Ils sont nés la même année. Pourtant, l'un a 32 ans et l'autre n'en a que 8. L'un aurait-il profité d'une cure de jouvence relativiste? Non, ils ont la même apparence physique. Alors, comment expliquer ce mystère?
14) - Imagine que ton horloge soit arrêtée. Tu n'as qu'une ressource. Venir chez moi et vérifier l'heure sur mon horloge, en espérant que je n'aie pas oublié de la remonter. Tu sais que tu effectues le trajet aller-retour de ton domicile au mien à la même vitesse. Comment pourras-tu remettre ton horloge à l'heure?
15) - Imagine que ta montre soit arrêtée. C'est terrible pour toi. Tu dois en effet prendre des cachets à heures fixes et à la seconde près. C'est pour toi une question de vie ou de mort. Tu rencontre deux jumeaux. Leurs montres sont désynchronisées, mais l'une indique l'heure exacte. Celui des jumeaux dont la montre indique la bonne heure dit toujours la vérité. Son frère, dont la montre n'est pas à l'heure, ment toujours. Il ne te reste plus beaucoup de temps avant de prendre ton prochain cachet, tu le sais intuitivement. Tu n'as le droit de poser qu'une seule question. Cette question, tu la poses aux deux frères. La réponse qu'ils te donneront t'indiquera l'heure exacte. Quelle est cette question vitale?
Précisons que tu as sous les yeux les montres des frères ennemis.
16) - Si une horloge sonne les 6 coups de 6 heures en 6", en combien de temps sonnera-t-elle les 12 coups de minuit?
17) - Encore un problème d'heure. Tu es enfermé dans ton cachot dans l'attente de ton exécution. Ton obsession est le temps. Tu désires savoir toujours quelle heure il est. Tu n'en dormirais plus. Tu te forcerais à te tenir éveillé pour profiter de chaque seconde. Mais la fatigue te terrasse. Tu dors profondément. Tu te réveilles en sursaut. Un cauchemar horrible dans lequel tu ne savais plus l'heure qu'il est. Mais la réalité est cruelle elle aussi. Tu n'as pas de montre. L'heure, tu la connais grâce au bruit d'un carillon lointain. Ce carillon sonne une fois tous les quarts d'heure et sonne les heures entières. Combien de temps va durer ton calvaire, dans le pire des cas, avant que tu ne soies sûr de l'heure qu'il est?
18) - Je ne peux m'empêcher de te poser l'énigme que le Sphinx a soumise à ...: quel est l'animal qui progresse à 4 pattes le matin, sur 2 pattes à midi et sur 3 pattes le soir?
19) - Quel est le chiffre de l'infini?
20) - Es-tu capable d'imaginer une question qui nous entraîne dans un mouvement perpétuel?
21) - Si je te dis qu'il y a trois heures d'ici, il devait s'écouler jusqu'à 8h. deux fois plus de temps qu'il ne devra s'en écouler dans une heure, peux-tu me dire, sans vérifier ta montre, quelle heure il est maintenant?
22) - Prisonnier du temps. Nihil, je t'emprisonne dans un cube indestructible, sans le moindre trou qui laisse passer le plus fin rayon de lumière. Bref, il est hermétique. Tu disposes d'une machine à voyager dans le temps. Comment pourras-tu t'échapper de ta prison, sachant que tu n'as droit qu'à un aller-retour dans le temps, et que tu ne peux éviter de revenir à l'instant précis où tu es parti dans le temps?
23) L'âge du capitaine
Le dernier jour d'un certain mois de la première guerre mondiale, un obus éclate et met au jour le squelette d'un capitaine. En multipliant l'âge du capitaine au moment de sa mort par le quart du nombre d'années écoulées entre sa mort et la date d'éclatement de l'obus, par le jour remarquable du mois d'éclatement de l'obus, par la longueur de la pertuisane (hallebarde) trouvée à côté du squelette, on trouve: 471569. Dernière indication: décomposez ce nombre énorme en facteurs premiers. Quel est l'âge du capitaine 0et en quelle année est-il mort
24) Le vol de la Colombe
Au même instant i, Nihil démarre de la ville A et Totus de la ville B distantes l'une de l'autre de 100 km, et se dirigent l'un vers l'autre sur une route parfaitement droite à la vitesse constante de 100 km/h. De la ville A part en même temps que Nihil une Colombe qui se dirige en ligne droite vers Totus à la vitesse de 120 km/h. Lorsqu'elle rencontre le véhicule de Totus, elle fait instantanément demi-tour et se dirige vers le véhicule de Nihil; lorsqu'elle rencontre celui-ci, elle fait à nouveau instantanément demi-tour et ainsi de suite jusqu'à ce que les véhicules de Nihil et Totus se croisent. A cet instant précis, quelle distance la Colombe aura-t-elle parcourue?
25) Quel âge as-tu?
Lorsque Totus lui demande son âge, Nihil lui répond: "Prends trois fois mon âge dans trois ans, et retranche trois fois mon âge il y a trois ans, et tu connaîtras mon âge actuel".
26) Croisière interplanétaire
Chaque jour à la même heure, un vaisseau quitte la Terre en direction de Mars, tandis qu'un autre quitte Mars en faisant route vers la Terre. Combien l'un des vaisseaux rencontrera-t-il dans l'espace de vaisseaux faisant route en sens contraire, sachant que le voyage dure exactement 7 jours dans un sens comme dans l'autre"?
27) Date d'anniversaire
Avant-hier, Totus avait 32 ans, l'année prochaine, il en aura 35. Quelle est la date d'anniversaire de Totus?
28) Passé, présent, futur
L'année dernière, Nihil a eu 32 ans, l'année prochaine, il en aura 32. Quel âge avait Nihil voici deux ans, quel âge aura Nihil dans deux ans et quand fêtera-t-il son prochain anniversaire?
29) Particules et temps de demi-vie
On a trouvé des restes d'organismes constituant 25% du taux de carbone 14 présent dans les organismes actuels. Sachant que la demi-vie de ce carbone radioactif est de 5700 ans, quel est l'âge des restes?
30) Voyage dans le temps
Que se passe-t-il si je remonte dans le temps et que je tue ma mère avant qu'elle ne m'ait mis au monde?
31) L'énigme de Poincaré
Comment mesurer un écoulement deux fois plus rapide du temps? Imaginez, comme le mathématicien Poincaré au début du siècle, que pendant votre sommeil, le temps s'écoule subitement deux fois plus vite. Existe-t-il un moyen de s'en rendre compte, si oui, lequel?
32) L'ombre de Lucky Luke
Lucky Luke peut-il tirer plus vite que son ombre?
33) Millénarisme
Quand commence le troisième millénaire?
34) Changements d'heure
Cette nuit, on passait de l'heure d'été à l'heure d'hiver, soit reculer les aiguilles d'une heures. J'ai rendez-vous à 13 heures. Or, distrait, j'ai avancé les aiguilles d'une heure au lieu de les reculer? A quelle heure me présenterai-je à mon rendez-vous?
35) Le temps des vacances
Pourquoi sommes-nous tous plus vieux que nous le pensons?
36) Dissymétrie
Un avion vole à 400km/h par rapport à l'air avec à l'aller un vent contraire de 40 km/h et au retour un vent favorable de 40km/h. Quelle est sa vitesse moyenne sur l'ensemble du trajet?
37) Compter les jours
Le 1er janvier d'une année non bissextile tombe un mercredi. Quel jour sera le 31 décembre de la même année?
Et s'il s'agit d'une année bissextile?
38) Vitesse de la lumière
Combien de temps faudrait-il à un objet en accélération constante pour atteindre la vitesse de la lumière?
39) Les filles de Totus
Totus met Nihil au défi de découvrir l'âge de ses trois filles.
Le produit de leurs âges est égal 36.
La somme de leurs âges est égal au numéro de sa maison.
Nihil réfléchit un bon moment et finit par dire qu'il lui manque une indication.
Totus lui précise alors que sa fille aînée est blonde.
Aussitôt Nihil donne l'âge des trois filles.
Quels sont donc ces âges? (10 points)
40) L'âge de Diophante
Voici l'épitaphe de la tombe de Diophante.
Des jours de Diophante, le sixième marqua son enfance, le douzième son adolescence, puis s'écoula encore le septième avant son mariage. Cinq ans plus tard, il eut un fils qui du destin reçut deux fois moins de jours que son père. Après la mort de son fils, Diophante passa encore quatre ans dans les pleurs puis il mourut. A quel âge est mort Diophante?
41) Combien de seconde par minute?
42) Quelle est la particularité de la minuterie par rapport à la plupart des autres objets de mesure du temps?
43) Et du calendrier par rapport à tout autre objet de mesure du temps?
44) 86400 1440 24 ?
45) Vous disposez de deux sabliers, l'un qui mesure un temps d'écoulement de 7 minutes, l'autre de 5 minutes. Comment mesurerez-vous le passage de 13 minutes?
46) Cloc, le petit voyageur du temps, est perdu dans le labyrinthe des époques passées et futures. Il arrive à un embranchement temporel. Il doit absolument rejoindre son époque. Une seule branche de l'embranchement y mène. Sur le bord du temps, une machine à explorer le temps occupée par les jumeaux Nihil et Totus. Totus ment toujours, Nihil dit toujours la vérité. Mais rien ne permet à Cloc de distinguer qui est Nihil et qui est Totus. Cloc n'a le droit de poser qu'une seule question, mais il peut la poser à Nihil ET à Totus. Quelle question Cloc doit-il leur poser pour connaître avec certitude la voie à emprunter pour rejoindre son époque?
47) Inge suggère à Julien l'âge de sa soeur Sandra à travers un énoncé diabolique: "J'ai deux fois l'âge qu'elle avait quand j'avais l'âge qu'elle a. La somme de nos âges est de 49 ans"!
48) Un nénuphar double de volume tous les jours. Il couvre exactement la surface d'un lac au bout de 21 jours. Après combien de jours couvre-t-il la moitié du lac?
SOLUTIONS DES ENIGMES
01) Tu n'espérais tout de même pas que j'allais te répondre 90 km/h? Ce serait tomber dans le piège d'une moyenne trop simple, qui ne tient pas compte de la réalité: additionner les deux vitesses et les diviser bêtement par deux. On n'est pas ici devant un problème mathématique abstrait, mais devant une situation physique concrète qui demande une "mobilité" de l'esprit.
Les deux vitesses n'ont pas la même valeur. La distance AB étant de 60km, l'aller à la vitesse de 60km/h se fait en une heure, tandis que le retour à la vitesse de 120km/h ne se fait qu'en 30'. Nous avons donc une distance totale de 120km effectuée en 1h30'. Pour connaître la vitesse moyenne, c'est-à-dire la distance parcourue en une heure, il faut diviser 120 par 3. Cà nous donne la vitesse moyenne en 30': 40km/h. On multiplie par 2 et l'on obtient la vitesse moyenne en une heure: 80km/h.
02) Le deuxième problème est plus subtil, mais il peut être facilement résolu sur la base du raisonnement précédent. La réponse spontanée, irréfléchie, que tu t'attends à entendre sortir de ma bouche, est 180km/h. En effet, 180 + 60 = 240, et 240:2 = 120. Non, non, non!
Dans l'énoncé du problème, la distance entre les villes A et B n'est pas spécifiée, car elle n'a pas d'importance dans l'absolu. Mais pour rendre plus claire la résolution du problème, prenons les conditions du problème précédent. On connaît la vitesse à l'aller, la distance entre A et B et la vitesse moyenne globale. Il nous manque la vitesse moyenne du retour.
Faisons un essai avec 180km/h. Cela veut dire que le temps aller est 1h ou 60' et le retour 20'. Selon notre formule, il faut diviser 120 par 4 = 30 et multiplier le tout par 3 pour obtenir la vitesse moyenne globale: 90km/h. (80':4=20'x3=60')
Multiplions la vitesse retour par 1000: 1800km/h. On ne mettra donc plus 20' mais 2' pour effectuer le trajet de retour. Au total, les 120km sont parcourus en 60' + 2' = 62'. Pas besoin de faire le calcul de la moyenne pour se rendre compte qu'elle est encore inférieure à 120km/h. Et c'est inévitable puisque le temps de parcours de B à A prend... du temps. Or, on a déjà épuisé à l'aller les 60' de la moyenne globale. Donc la moyenne globale sera toujours inférieure à 120km/h.
La seule solution consiste à revenir "instantanément", c'est-à-dire à vitesse infinie, de B vers A. Alors seulement on n'ajoute pas de temps de retour au temps de l'aller. Et on obtient bien au total une vitesse moyenne de 120km/h.
03) Pour parcourir 200m en 4", on roule à une vitesse moyenne de 50m/s. Cette vitesse moyenne est atteinte à la "moitié" du temps de parcours, c'est-à-dire au bout de 2". Il reste donc 2" pour accomplir les 150m qui restent à parcourir. Il nous suffit de diviser 150 par 2 pour obtenir la vitesse moyenne pendant les 150 derniers mètres: 75m/s.
Pour parcourir 250m en 5", on roule à une vitesse moyenne de 50m/s. Cette vitesse moyenne est atteinte à la "moitié" du temps de parcours, c'est-à-dire au bout de 2" et demie. Il reste donc 2" et demie pour accomplir les 200m qui restent à parcourir. Il nous suffit de diviser 200 par 2 et demie pour obtenir la vitesse moyenne en 1" pour les 200 derniers mètres: 80m/s.
La conclusion est claire: le véhicule b est plus performant que le a.
04) La belle affaire. Me prends-tu donc pour un âne? Au moment où nous nous croiserons, nous serons bien sûr aussi près ou aussi loin, c'est selon, de la ville A ou de la ville B l'un que l'autre.
Nous nous croiserons à 13h20'. En effet, à l'instant où je démarre, à 13h, tu as déjà parcouru 60km. Nous sommes donc séparés l'un de l'autre de 60km. En un quart d'heure, j'aurai parcouru 30km et toi 15km. Au total 45km. Une distance de 15km nous séparera donc encore. S'il nous a fallu un quart d'heure pour parcourir ensemble 45km, 5' nous suffiront pour couvrir ensemble 15km. Nous ajoutons ces 5' au 15' précédentes et nous obtenons 20'.
05) J'aurais été impardonnable de tomber dans un piège aussi grossier. Bien sûr 1h30' et 90' sont équivalents.
06) Encore une fois, j'éviterai de tomber dans le piège que tu me tends, même s'il est moins dangereux, moins sournois que les précédents. Car ici, pas de crainte de se tromper, mais de s'épuiser dans une série infinie d'additions de fractions de distances. En effet, tu t'attendais à ce que j'additionne le temps et les distances parcourues par la mouche au cours de son va-et-vient entre les deux trains. Ainsi, au bout d'une heure, la mouche a parcouru 75km et le train A 50km. Mais ce n'est pas à ce moment-là qu'ils se rencontrent. Il faut qu'ils aient parcourus à eux deux 200km avant de se rencontrer une première fois. C'est au bout d'1h36' que la mouche et le train A auront parcouru cette distance. La mouche aura alors parcouru 120km tandis que le train en aura couvert 80. Bien sûr, dans le même temps, le train B a lui aussi parcouru 80km. Donc au moment où la mouche fait demi-tour, les trains A et B ne sont plus distants l'un de l'autre que de 40km. Ces 40km représentent le 1/5è de la distance initale, 200km. C'est au bout d'un temps 5 fois plus court que la mouche et le train B se rencontreront, soit après 19,2' (1h36' : 5). Puisque les trains avaient parcourus 80km en 1h36', ils ne couvriront plus que 16km, soit 5 fois moins en 19,2'. Puisque les trains A et B ont parcouru la même distance, ils ont effectué à eux deux 32km et ils ne sont plus distants l'un de l'autre que de 8km. La mouche a bien sûr fait demi-tour une fois qu'elle a rencontré le train B. Elle rencontrera le train A pour la deuxième fois après 3,84', soit 19,2 : 5. Les trains auront parcouru chacun dans ce temps 3,2km, soit 16 : 5. Ils ne sont donc plus séparés que de 1,6km. Et ainsi de suite à l'infini.
Voilà la réponse à laquelle tu t'attendais de ma part. Mais je ne te l'ai donnée que pour mieux te tromper. Le problème peut être résolu de façon beaucoup plus simple. Puisque les trains A et B sont distants l'un de l'autre de 200km et qu'ils roulent à une vitesse constante de 50km/h, ils se rencontreront au bout de deux heures. Puisque la mouche vole de l'un à l'autre à une vitesse constante de 75km/h, elle aura parcouru 150km. C'est aussi simple que cela.
07) Néanmoins, la résolution du problème par l'addition d'une série infinie de fractions de distances, permet de se rendre compte que la question 7 n'a pas de solution. Il est en effet impossible de déterminer dans quelle direction vole la mouche au moment où les trains se rencontrent, puisque l'on ne peut assigner un dernier terme à la série.
08) De même on ne peut dire où se trouvera la mouche si l'on inverse le phénomène après que les trains se soient rencontrés.
N.B. L'ART peut-il être utile ici?
09) Si la longueur de l'élastique ne variait pas, il me faudrait simplement 1000" pour aller d'un bout à l'autre de celui-ci, soit 16'40".
Mais l'élastique s'allonge d'1km par seconde. Tu t'attends à ce que je te dise que je ne pourrai jamais atteindre le point B, puisqu'à chaque seconde, il s'éloigne de moi de 999m. Encore une fois j'évite de tomber dans le piège. En effet, je fais partie de l'élastique. Lorsqu'il s'allonge, j'avance en même temps que lui.
Pendant la première seconde, j'ai parcouru 1m, c'est-à-dire 1/1000è de la distance totale. Au cours de la 2è seconde, l'élastique s'est allongé de 1000 mètres. Il mesure donc 2000m. Comme ma vitesse est constante, j'ai encore progressé d'1m. Mais ce mètre représente maintenant la 1/2000è partie et non plus la 1/1000è partie de la distance totale. Et ainsi de suite. On obtient donc la série harmonique suivante:
Or nous avons vu que cette série est une série divergente (voir le Paradoxe de la flèche de Zénon). Autrement dit, plus on lui ajoute de termes, plus le nombre x vers lequel elle tend est grand. Donc plus elle s'éloigne du nombre de départ. Cela veut dire que j'atteindrai avec certitude le bout de l'élastique. Le dénominateur de la dernière fraction, x, indique le nombre de secondes qu'il m'aura fallu pour atteindre le bout de l'élastique, et il m'indique bien sûr aussi le nombre de kilomètres de l'élastique à ce moment-là. Ce temps et cette distance sont immenses, plus vieux et plus grand que l'univers. Mais pour moi, cela ne représente rien.
Voyons maintenant la variante que tu me proposes. Si l'élastique s'allongeait dans une progression géométrique et non plus arithmétique, c'est-à-dire si sa longueur doublait à chaque seconde, je n'en atteindrais jamais l'extrémité. Pourquoi? Parce que j'aurais alors affaire à une série convergente et non plus divergente. Cette série convergerait vers 2/1000,
010) C'est un problème imaginé par Lewis Caroll. A raison d'une minute de retard par jour, il faudra attendre 720 jours, puisque 12 heures comptent 720 minutes, pour retrouver l'heure exacte. L'horloge arrêtée donne l'heure exacte 2 fois par jour. Si l'on considère que l'heure donnée par l'horloge la plus précise du monde reste entâchée d'une infime imprécision, on peut même considérer que l'horloge arrêtée donne deux fois par jours une heure absolument exacte, et à cette occasion est plus fiable que l'horloge la plus précise qui fonctionne. Reamrquable, n'est-ce pas?
011) Phénomène étrange qui met en évidence l'importance du point de vue auquel on se place. Je sais à quel point tu as été troublé, cher Totus, par les paradoxes du disque en mouvement. Le problème que tu me soumets en est une variante. Peut-être sa solution t'éclaircira-t-elle les idées.
Observe les 4 positions de la roue sur la figure. J'ai indiqué dessus deux points: A au sommet, B à la base. La vitesse de la roue, ou plutôt la vitesse de chacun des points se calcule par rapport au sol. C'est là le point important. Puisque la vitesse est le rapport de la distance du point au sol par le temps, et que le temps est le même pour les deux points, le point B a une vitesse nulle, v = 0, alors que le point A a une vitesse maximum, v = e/t, sur le premier dessin. Le e représente la distance du point au sol. Dans le cas de A, cette distance est la plus grande possible. Puisque t reste constant, le résultat est grand.
Mais à mesure qu'il descend, la vitesse du point A diminue, tandis que la vitesse du point B augmente à mesure qu'il monte. Normal, la valeur de e diminue dans le cas de A et augmente dans le cas de B.
Si l'on considérait maintenant le cas de la partie de la roue d'un train qui descend sous le rail, la vitesse v = -e/t est négative, puisqu'elle passe sous la ligne de référence que constitue le haut du rail.
Donc la même roue peut avoir des vitesses différentes à la fois et même des vitesses positives et négatives à la fois. Bien sûr tout cela s'explique par le point de vue adopté: le sol ou le rail. Les paradoxes s'envolent dès que l'on prend le point de vue le plus logique, celui qui met tous les points sur le même pied: le centre de la roue. Par rapport à lui, tous les points ont toujours la même vitesse. Cette vitesse est une vitesse angulaire
012) Il semble que tu m'aimes trop ou que tu sois trop bête pour vouloir réellement ma mort. En effet ton plan diabolique garantit ma survie. Puisque je dois être surpris que l'on vienne me chercher le matin de mon exécution, je ne peux mourir le dimanche de la semaine prochaine, qui consitute le dernier jour de la semaine. Car si je n'ai pas encore été éxécuté jusque là, le samedi en fin de matinée, je saurai avec certitude que je serai exécuté le lendemain matin. Voilà qui tue l'effet de surprise et me laisse la vie sauve, puisque l'effet de surprise était une condition nécessaire à l'éxécution de la peine (de mon exécution).
Bien sûr le même raisonnement peut s'appliquer au samedi. Puisque je ne peux périr le dimanche, le samedi devient le dernier jour où je puisse être exécuté. Si je ne suis pas extrait de ma cellule et de mon existence le vendredi à l'aube, je saurai que le bourreau viendra me chercher le lendemain matin.
- Tu m'as l'air surpris. T'aurais-je pris à ton propre jeu? Concluons ce beau raisonnement. Si je ne peux être exécuté le samedi, le vendredi devient le dernier jour où je puisse être exécuté. Pour les raisons que tu sais, cela n'est pas possible si j'ai survécu à la matinée de la veille, le jeudi. Je t'épargne le supplice de la répétition de l'explication. Exit le jeudi, le mercredi, le mardi. Nous voilà lundi, c'est-à-dire demain. Je ne peux être exécuté que ce lundi. Mais où est l'effet de surprise? Je te laisse, j'ai tant de choses à vivre encore.
Fort de la logique implacable de son raisonnement, Nihil exécute quelques pas de danse et quelques morceaux de musique. Le mercredi matin, Totus frappe à la porte de la chambre de Nihil. Il entre à l'invitation de son ennemi. Avec un air triomphant, il sort une gomme de sa poche et s'exécute aussitôt au pied du lit de Nihil. Celui-ci, stupéfait, sourit de dépit à la vue de l'instrument de son supplice. C'est ce sourire qui tente de donner le change, que Totus efface. Une larme coule sur sa joue. C'est une larme de joie et de tristesse.
...dans un autre temps... Nihil, antiphénix, disparaît sans cesse du paysage littéraire, de la pensée qui a presque réussi à matérialiser le néant.
Avoue, mon cher Nihil, que je t'ai laissé pantois. J'ai pu exécuter ma sentence, contrairement à ce que ton raisonnement subtil te laissait croire. Ce raisonnement contenait une faille. Cette faille s'élargissait avec l'exécution progressive des jours de la semaine où tu pensais ne pouvoir être exécuté. En effet, si tu étais convaincu de ne pouvoir être exécuté aucun jour de la semaine, ton exécution lors d'une quelconque matinée devait fatalement te surprendre. Tu m'as donc donné toi-même la possibilité de tenir parole. Avoue que ton sort est ironique.
- Je vais te donner une explication logique du paradoxe de l'impossibilité de l'exécution surprise.
Le raisonnement déductif par lequel tu as tenté de te convaincre de l'impossibilité de ton exécution, procède SRUOBER A,
A REBOURS du cours normal de la réalité, du sens du temps. Ta connaissance du cours des événements est rétrospective, alors que la connaissance réelle d'un événement futur ne peut être qu'anticipative, prospective. Tu raisonnes sur des événements qui n'ont pas encore eu lieu alors que tu ne peux que supposer leur réalisation. D'où le paradoxe. Ta logique ne tient pas compte de la réalité. Or c'est bien de la réalité qu'il s'agit, ton exécution-surprise le prouve. Il est donc normal que logique et réalité se contredisent. La logique ou la réalité? Les deux termes peuvent être sujet et/ou objet.
Ton raisonnement repose sur des "si", des hypothèses: "Si je n'ai pas été exécuté la veille...". Voilà la faille de ton raisonnement.
- Mais si on réduit le choix d'exécution à deux jours? D'après Poundstone, un être intelligent saura que ce ne peut être le second jour. Donc c'est le premier et plus d'effet de surprise. En effet, si ce n'est le premier, c'est le second. Pas d'effet de surprise. Donc çà ne peut être que le second.
- Faux! On ne peut comparer la certitude liée au second jour à la conviction liée au premier. La logique voudrait que l'exécution se fasse le premier jour. Mais Totus, par bêtise ou par subtilité, peut la programmer le second jour. En toute rigueur, Nihil ne peut être "certain" que ce sera le premier jour. Il peut seulement en être convaincu. Nuance d'importance. La réalité est plus subtile que la logique.
- Nous avons ici un exemple de l'importance de l'imagination dans le temps, l'anticipation du temps. Par elle, on tente d'éliminer le temps, de rendre tout réalisé, présent. Mais le temps, son cours, existe.
013) Vieux problème de calendrier. Il est clair que ton jouvenceau doit être né un 29 février. Comme cette date ne tombe que les années bissextiles, c'est-à-dire une fois tous les 4 ans, le jeune homme n'a l'occasion de fêter son anniversaire que tous les 4 ans, soit 4 fois moins souvent que son ami. D'où un âge quatre fois moindre pour une même apparence.
014) Je remonte mon horloge et je retiens l'heure de mon départ. Je me rends chez toi. Je note l'heure de mon arrivée. Je note l'heure de mon départ de chez toi et le temps resté chez toi. Je me rends chez moi. Je note l'heure de mon arrivée. Je la soustrais de mon heure de départ. Je soustrais de ce total le temps que je suis resté chez toi. Le reste me donne le temps que j'ai mis pour effectuer le trajet aller-retour à vitesse constante. Je divise ce temps par deux pour connaître le temps mis pour revenir chez moi. Il me reste à ajouter ce temps à l'heure que j'ai lue sur ton horloge au moment de mon départ de chez toi. Et je sais l'heure exacte que je dois indiquer sur mon horloge. Merci!
015) Ce problème est le plus beau que tu m'aies posé. Sa solution exige une subtilité qui a réellement mis mes neurones à rude contribution. Il s'agit de se rendre compte que la question que je dois poser aux jumeaux ne doit pas recevoir deux réponses différentes. En effet, puisque j'ignore lequel des compères ment, je ne peux distinguer deux réponses différentes. Je ne pourrais le faire que si ma question comportait un élément dont je sois sûr de la véracité ou de la fausseté. Or de nombreuses réflexions ne m'ont pas permis de découvrir cet élément. Il fallait donc me rabattre sur une question qui amènerait une réponse identique de la part des deux acolytes.
Cette question, c'est: "Quelle heure va m'indiquer ton frère"?
Que va me répondre celui qui dit la vérité? Puisqu'il sait que son frère ment, il va me donner la réponse que me donnera son frère, autrement dit la mauvaise heure.
Que va me répondre celui qui ment? Un mensonge, bien sûr, qu'il va placer, suprême lâcheté, dans la bouche de son frère.
Tous deux m'indiquent donc la mauvaise heure. Par défaut, la bonne heure ne peut être que celle indiquée par la deuxième horloge.
Mais si le menteur, très subtil, tenait compte de mon désarroi et m'indiquait la bonne heure?
016) En 13"2/10. En effet, les 6" des 6 coups de 6h. se répartissent sur 5 intervalles, ce qui donne 1"1/5 entre deux intervalles, soit 6/5. Le premier coup ne prend pas de temps. Pour les 12 coups de minuit, il y aura 11 intervalles. Soit 11 x 6/5 = 13,2".
017) Imaginons que je me réveille à 12h00'01".
Il me faudra attendre 1h44'59" pour connaître l'heure exacte. Il faudra que j'entende 7 fois 1 coup pour être sûr qu'il est 13h45'. En effet, imaginons que je me réveille à 12h00'01". J'entends 1 coup à 12h15', 1 à 12h30', 1 à 12h45', 1 à 13h, 1 à 13h15', 1 à 13h30' et 1 à 13h45'. A 14h, j'entends bien sûr 2 coups, mais je ne dois pas les attendre pour être sûr de l'heure. En effet, le réveil à 12h00'01" est la situation extrême. La première fois que j'entends 1 coup, ce pourrait être un des 7 coups de la série énumérée. La deuxième fois, un des 6 coups restants de la série. La troisième fois, un des 5 coups restants de la série, etc. Il n'y a qu'au septième coup que je suis sûr de ne pas entendre une huitième fois 1 coup. Il ne peut être que 13h45'.
018) L'homme bien sûr. Enfant à quatre pattes le matin, adulte sur ses deux jambes à midi, vieillard avec une canne le soir.
019) Ce chiffre est le 8. Un infini renversé qui figure bien l'âge du mouvement intensif.
020) J'ai d'abord pensé à la question: "Quels mots composent cette question?". Mais tu aurais pu me faire remarquer que la réponse: "Quels mots composent cette question", ne comprenait pas le point d'interrogation. La réponse n'aurait donc pas constitué une répétition de la question initiale à laquelle il nous faudrait répondre éternellement. Mais j'ai trouvé la parade. Il me suffit de remplacer le mot "mots" par le mot "signes". En effet, une lettre est un signe et le point d'interrogation aussi. A la question:"Quels signes composent cette question?", on répond sans fin: "Quels signes composent cette question?". Subtile, n'est-ce pas?
021) Il est 3h.
022) Il me suffit de reculer jusqu'à l'instant qui précède la pose de la dernière pierre de ma prison. Je sors de ma prison et je retourne au moment où je l'ai quittée, dans ma machine à voyager dans le temps. Je serai libre comme l'air, mais à nouveau prisonnier du temps.
023) D'abord, décomposer 471569 en facteurs premiers. Le jour remarquable du mois d'éclatement de l'obus doit être un 29 février. Le 31 n'a rien de remarquable puisqu'on le rencontre 7 fois sur l'année. 23 ?
024) Inutile de se compliquer la vie en calculant des séries interminables. C'est au bout d'une demi-heure que Nihil et Totus se croiseront. A ce moment, la Colombe aura parcouru 60km.
Le mathématicien John von Neumann
025) 19 ans
026) 13
027) 31 décembre
028) 28 et 32, dans trois ans
029) 11400
030) Je remonte dans le temps,
Je tue ma mère,
Donc, je n'existe pas,
Donc, je ne remonte pas dans le temps,
Donc, je ne tue pas ma mère,
Donc, j'existe,
Donc, je remonte dans le temps...
031) Avant tout, je dois me demander ce que signifie le fait que le temps s'écoule deux fois plus vite. D'après notre nouvelle définition du temps, il s'agirait d'une énumération deux fois plus rapide de la suite des nombres réels. Cette énumération est actualisée en chaque chose, en chaque événement, en trois dimensions. Tout devrait donc s'écouler deux fois plus vite. Notre coeur devrait battre deux fois plus vite, la terre tourner deux fois plus vite sur elle-même et réduire de moitié son temps de révolution autour du soleil. Si ce n'était pas le cas, si le temps était purement abstrait, s'il s'écoulait seul deux fois plus vite, et que le mouvement de toute chose restait identique à lui-même, nous parcourrions une distance deux fois plus courte que ce que nous indiquerait le compteur de notre véhicule. Nous roulerions à 60km h-1 pendant une heure qui ne vaudrait plus qu'une demi-heure, nous ne parcourrions donc plus que 30km. Cette observation nous permet de bien comprendre la nature du temps. Dans la formule "v = e/t", le temps est inversément proportionnel à la vitesse. Lorsque la vitesse d'écoulement du temps double, la vitesse seule diminue de moitié, car v = 60km/120'. Si l'on double la vitesse de toute chose, donc de notre véhicule en plus du temps, v = 120km/120'. Il faut ajuster le tachymètre à 60km h-1.
- Mais si tout mouvement et plus seulement le temps s'écoule deux fois plus vite, notre pensée et notre perception devraient également s'effectuer deux fois plus vite. Donc nous ne devrions pas pouvoir observer cet écoulement deux fois plus rapide du temps. Par rapport à quoi pourrions-nous le constater? Il faudrait que nous ne fassions pas partie de l'univers, que nous ne soyions pas pris dans le mouvement de l'être, bref il faudrait que nous n'existions pas. Ce serait le seul moyen de prendre le recul nécessaire à l'observation de l'écoulement deux fois plus rapide du temps.
- Mais dans de telles conditions...
- Je ne te le fais pas dire.
- Il reste pourtant une chose qui ne doit pas être affectée par cette variation.
- La mémoire. Tu peux garder le souvenir de la vitesse d'évolution des événements.
- N'oublie pas que les souvenirs doivent eux-aussi défiler deux fois plus vite. Comment pourrais-tu garder la trace de la vitesse de déroulement d'événements deux fois plus lents? Puisque cette trace est relative aux événements eux-mêmes et que ces événements ne s'actualisent, par définition, qu'au présent, ils acquièrent leur vitesse de déroulement au moment où tu t'en souviens. Ils s'écouleront donc à la nouvelle vitesse, c'est-à-dire deux fois plus vite qu'au moment de leur impression dans ta mémoire.
Pour bien te faire comprendre cela, je prends l'exemple d'un autre type de mémoire moins souple que la nôtre: la pellicule d'un film. Pour simuler notre perception de la réalité, un film doit défiler à la vitesse de 24 images par seconde.
- Le déroulement du film sera deux fois plus rapide et nous ne nous rendrons compte de rien. Dans le nouveau temps, le film de ta caméra tourne deux fois plus vite, mais l'aiguille de ton horloge aussi. Ce n'est donc pas 48 mais 24 images qui seront impressionnées par seconde, selon ce nouveau temps. L'erreur est de considérer la nouvelle vitesse par rapport à l'ancien temps: alors on observe bien 48 images par seconde. En effet, une seconde de l'ancien temps correspond à deux secondes du nouveau temps. Si l'on associe 24 images à chaque nouvelle seconde, on a 48 images seconde par rapport à l'ancien temps. Or une seconde du nouveau temps correspond à 1/2 seconde de l'ancien temps. Pendant cette 1/2 seconde, 12 images auraient bien été filmées, et les proportions sont gardées. Une autre façon de se rendre compte de l'impossibilité de constater à travers les images d'un film le doublement du temps, c'est d'imaginer ce que voient les êtres de ce nouveau temps. De notre point de vue, ils courent deux fois plus vite. Il y a une différence entre notre vitesse propre, et leur vitesse. représentée par le film accéléré. Mais de leur point de vue, il y a correspondance entre leur vitesse propre et leur vitesse telle qu'elle est représentée sur le film.
En réalité, le problème peut être résolu de façon beaucoup plus simple. Il suffit d'observer l'aiguille d'un tachymètre, ou si tu préfères le compteur kilométrique de ton véhicule. Puisque tu te déplaces deux fois plus vite, la vitesse indiquée par ton compteur sera deux fois plus grande dans le même temps. En effet, imagine une ligne droite de 60km. Dans l'ancien temps, tu la parcours à la vitesse moyenne de 60km h-1. Tu la couvriras en 1 heure. Dans le nouveau temps, tu roules deux fois plus vite. Ton compteur indique donc 120km h-1. Mais comme le temps passe lui aussi deux fois plus vite, tu n'auras parcouru que 60km pendant l'heure de ton nouveau temps. Or ton compteur indique 120km h-1 de moyenne. Tu aurais donc dû parcourir 120km, si tu te fies à lui. La mesure de la distance que tu effectueras pour vérifier tes doutes te confirmera l'accélération du temps. Le tour est joué.
- Raisonnement magnifique de simplicité. Je ne résiste pas au plaisir de te soumettre quelques variantes de ce problème. Ainsi, comment détecter un temps deux fois plus lent? Ou encore 1000 fois plus lent ou plus rapide? Et si le temps s'arrêtait soudain à l'instant où je veux terminer cette... phrase? Et si le temps s'écoulait à l'envers? Et si le temps avait commencé il y a cinq minutes? C'est un problème proposé par le philosophe et logicien anglais Bertrand Russell qui est d'actualité, puisque les révélations du téléscope Hubble nous suggèrent que notre univers doit être plus jeune que certaines de ses galaxies.
- Que pourrait changer à mon raisonnement le fait que le temps s'écoule 2, 3, 10, 1000 fois plus lentement ou plus vite? Le principe est exactement le même. Par contre, il existe une autre façon de mesurer de telles variations dans l'écoulement du temps. Nous avons vu dans le chapitre consacré à la théorie de la relativité d'Einstein que la masse d'un corps avec sa vitesse. Une variation de la masse d'un corps pourra donc indiquer une variation dans la vitesse d'écoulement du temps.
032) Oui!
Lucky Luke tire même forcément plus vite que son ombre?
Son mouvement ne peut dépasser, tout comme celui de son ombre, la vitesse de 300000km/s.
Mais comme l'ombre est éloignée de lui, même d'une distance infime, la lumière qui l'environne prend un certain temps avant d'atteindre son objectif. Ce temps, quoiqu'infinitésimal, est suffisant pour créer un décalage entre le mouvement de Lucky Luke et celui de son ombre. Au moment où Lucky Luke dégaine son six coups, son ombre a encore les bras ballants.
Quant à lui, Lucky Tachyon dégainerait, de façon absolue, son six coups plus vite que son ombre.
Si l'ombre précède parfois son modèle en mouvement dans l'espace, elle le suit toujours dans le mouvement du temps. L'ombre de Lucky Luke est toujours plus jeune que Lucky Luke.
Lucky Luke, l'homme qui tire forcément plus vite que son ombre!
033) Tout le monde, ou presque, répond: "le 1er janvier de l'an 2000". Et nombreux sont les individus, les organisations et même les nations qui préparent déjà l'événement avec fébrilité, fidèles à l'esprit millénariste. Certains, bien sûr, prédisent la fin du monde ou les pires catastrophes.
Pourtant, il semble que toutes ces personnes commettent une erreur technique. Le troisième millénaire, en effet, ne devrait commencer que le 1er janvier de l'an 2001. L'an 2000 conclura le 2ème millénaire, comme l'an 1000 a conclu le premier. La confusion vient de l'assimilation de la naissance du Christ à l'an 0. En réalité, le jour de la naissance du Christ constitue le 1er jour de la première année du premier siècle du premier millénaire. Il n'y a pas de jour 0 ni d'an 0. On commence directement par 1. Par conséquent, le premier jour du 2ème millénaire est bien le 1er janvier de l'an 1001. Et le premier jour du 3ème millénaire le 1er janvier de l'an 2001.
Néanmoins, il faut reconnaître que ce calcul laisse un
sentiment diffus d'insatisfaction. La rigueur logique ne
rejoint pas l'intuition, qui ne peut s'empêcher de trouver plus convenable l'attribution du début du troisième millénaire au 1er janvier de l'an 2000. Un petit raisonnement va nous confirmer cela. Posons des questions au sceptique:
Quand commence le 3ème millénaire? En l'an 2001.
Quand commence le 21ème siècle? En l'an 2000.
Voilà qui doit déjà sembler étrange à notre interlocuteur. Le troisième millénaire et le vingt-et-unième siècle ne commencent pas en même temps. Mais poursuivons notre raisonnement.
Quand commence le 1er millénaire? En l'an 1 au 1er siècle.
Donc, premier siècle et premier millénaire commencent en même temps.
Quand commence le 1er siècle? En l'an 1.
Quand commence le 2ème siècle? En l'an 100.
Logiquement, le 2ème siècle aurait dû commencer en l'an 101. Donc, une erreur de calcul est commise dès le 2ème siècle et admise depuis par tout le monde, y compris par ceux qui affirment que le 3ème millénaire commence le 1/01/2001. Selon eux, le 21ème siècle devrait commencer également le 1/01/2001.
Par conséquent, soit le sceptique a raison, le 3ème millénaire commence bien le 1/01/2001, mais alors il commet l'erreur de faire commencer le 21ème siècle en l'an 2000; soit nous avons inconsciemment régularisé dès le deuxième siècle le calcul qui considère qu'il y a eu un an 0.
Conclusion, notre intuition selon laquelle le 3ème millénaire commence le 1/01/2000 n'est pas prise en défaut, l'erreur de calcul de temps initiale s'est effacée, a été assimilée avec le ... temps! C'est l'exception qui confirme la règle.
Et c'est bien ce que semble nous enseigner le bon sens.
Pourtant, entendre ou lire que 1999 est le dernier réveillon avant le 3ème millénaire laisse un goût d'inachevé. On voudrait alors intégrer l'an 2000 au 2ème millénaire. Peut-être ce sentiment est-il dû à notre système de numération décimal qui veut que l'on inclue 10 dans la première dizaine, 20 dans la deuxième, 100 dans la dixième dizaine ou la première centaine. Le premier millénaire inclurait donc l'an 1000 et le deuxième millénaire comencerait en 1001, le troisième en 2001.
D'un autre côté, la naissance du Christ n'a pas de sens le 1/01/1 car il serait alors déjà dans sa deuxième année. En fait, il serait bien né le 1/01/0, à la première seconde du premier millénaire. Et pour confirmer alors que le millénaire commence bien en 1000, 2000 ou 3000, on peut remarquer que le comptage décimal fonctionne très bien à partir des dizaines. Ainsi, il y a bien dix nombres de 10 à 19, de 20 à 29, etc.
Reste le problème de la première dizaine qui ne comprend alors que 9 nombres, le 0 ne faisant pas partie de la famille. Il ne sera d'ailleurs inventé par les indiens que bien après
l'arithmétique. Mais n'est-ce pas cette invention du 0 qui
provoquera la confusion entre deux systèmes de comptage décimaux, l'un qui inclut 10 à la première dizaine, et l'autre à la deuxième dizaine?
En tous les cas, nous nous trouvons devant une question difficile qu'on laissera le soin au lecteur de trancher à sa convenance.
034) A 11 heures
035) Parce que nous avons passé plus ou moins trois mois dans le ventre de notre mère.
036) 396 km/h et non pas 400 km/h comme on est tenté de le répondre spontanément. En effet, imaginons que l'avion doive parcourir la distance de 360 km. Il la parcourra en 1h à l'aller et en 49' au retour, soit 720 km en 109 minutes.
037) Mercredi et jeudi
038) Vitesse finie instantanée
Depuis Röemer au 17è siècle, on sait que la vitesse de la lumière est finie. On connaît aujourd'hui la valeur précise de cette vitesse. Elle est de 299 792 458 m/s.
Ce à quoi on songe moins, c'est que la lumière issue de la flamme d'une allumette doit atteindre instantanément cette vitesse fabuleuse.
Je me suis amusé à effectuer un petit calcul pour savoir combien de temps il faudrait à un objet quelconque en accélération constante pour atteindre la vitesse de la lumière?
Nous avons l'habitude de formuler les vitesses en kilomètres parcourus en une heure. Convertissons les
300000km/s de la lumière en km/h: on obtient
10800000000 (dix milliards huit cent millions de kilomètres en une heure:
3600s x 300000km/s).
La loi de Galilée dit que la vitesse d'un objet en accélération constante est fonction du carré des temps. Pour connaître le temps mis par l'objet pour atteindre la vitesse de la lumière, il suffit de retirer la racine carrée de
10800000000. On obtient:
100004 heures. Il nous reste à convertir ces
100004 heures en années pour obtenir une représentation plus parlante de ce temps. Une année équivaut à
8774,4 heures. Nos
100004 heures équivalent à
11,397246 ans. Voilà le temps qu'il faudra à un objet en accélération constante pour atteindre la vitesse de la lumière.
039) "Le produit de leurs âges est égal 36".
La première chose à faire est d'envisager toutes les combinaisons possibles de 3 chiffres dont le produit est 36
1 . 1 . 36
1 . 2 . 18
1 . 3 . 12
1 . 4 . 9
1 . 6 . 6
2 . 2 . 9
2 . 3 . 6
3 . 3 . 4
"La somme de leurs âges est égal au numéro de la maison du voisin d'en face".
La deuxième étape consiste donc à additionner chacune des combinaisons
1 + 1 + 36 = 38
1 + 2 + 18 = 21
1 + 3 + 12 = 16
1 + 4 + 9 = 14
1 + 6 + 6 = 13
2 + 2 + 9 = 13
2 + 3 + 6 = 11
3 + 3 + 4 = 10
C'est ici que ça devient intéressant. Sans tenir compte de la troisième information de Totus, on se dit qu'on peut éliminer le nombre 13 puisqu'il se répète deux fois, mais après avoir pris connaissance de cette troisième information, on s'aperçoit qu'elle ne permet pas de distinguer entre les autres nombres celui qui indique le numéro de la maison du voisin, et que par conséquent, l'information supplémentaire que donne Totus concerne le résultat 13. Et soudain, EUREKA, si Totus précise que sa fille aînée est blonde, c'est que ses soeurs jumelles sont plus jeunes qu'elle. Par conséquent, les âges à retenir sont 2, 2 et 9 ans.
040) Le sixième n'est pas le sixième jour, mais 1/6è des jours vécus par Diophante. Il faut donc trouver un nombre qui soit divisible par 6, par 12 et par 7. Le premier de ces nombres est 84. On a 14 ans pour la jeunesse, 7 ans pour l'adolescence et 12 ans encore jusqu'au mariage de Diophante, soit à 33 ans. Il a son fils 5 ans plus tard, soit à 38 ans. Son fils a vécu deux fois moins longtemps que lui, soit 42 ans. Diophante a donc 80 ans quand son fils meurt. Il pleure 4 ans et meurt à 84 ans.
041) Une seule seconde seconde par minute.
042) Le temps de la minuterie est mesuré à rebours comme la pendule d'échecs.
043) Le calendrier mesure un temps irréversible contre mouvement cyclique, réversible, répétitif pour les autres moyens de mesure du temps.
044) 1 pour un jour
045) C'est un excellent exercice de pensée en mouvement, qui se distingue de la résolution de problèmes statiques comme les problèmes géométriques. C'est une étape intermédiaire entre la pensée mathématique et la pensée physique.
Vous retournez les deux sabliers en même temps. Lorsque le sable du sablier de 5 minutes s'est complètement écoulé, vous le retournez aussitôt. Lorsque le sable du sablier de 7 minutes s'est complètement écoulé, vous le retournez aussitôt. Lorsque le sable du sablier de 5 minutes s'est complètement écoulé pour la deuxième fois, soit après 10 minutes, il s'est écoulé trois minutes pour le sablier de 7 minutes. Il vous suffit donc de retourner aussitôt celui-ci pour ajouter 3 minutes aux 10 minutes déjà écoulées.
046) Quelle voie va m'indiquer ton frère?
Celui qui dit la vérité, répondant à la place de son frère, va donner la réponse fausse que celui donnera. Quant au menteur, il va faire passer son frère pour un menteur et indiquera donc de toute façon la mauvaise voie. Cloc obtient deux fois la même réponse.
En effet, ne sachant qui est le menteur et qui dit la vérité, Cloc ne peut pas poser une question qui amène deux réponses différentes. Il doit absolument poser une question à laquelle Nihil et Totus répondront la même chose. Puisqu'on est certain que l'un des deux ment, forcément la réponse donnée est fausse, donc il s'agit de l'autre voie.
Pour connaître directement la bonne voie, Cloc doit simplement demander: "Quelle voie ne va pas m'indiquer ton frère?"
047) La particularité de cette énigme est d'exiger une grande concentration pour en comprendre l'énoncé subtile.
Il y a 7 ans d'écart entre Inge et Sandra. Inge a 28 ans, Sandra 21 ans.
048) Avec un bel enthousiasme, on répond "10 jours et demi"!
C'est à la fois trop simple et trop compliqué.
Il faut procéder, compter à rebours. On sait qu'au bout de 21 jours, le nénuphar recouvre toute la surface et qu'il double de volume tous les jours. C'est donc qu'il était deux fois plus petit le jour d'avant et qu'il recouvrait alors la moitié de la surface du lac. C'est au bout de 20 jours qu'il recouvre la moitié du lac.
CURIOSITES
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l'énigme du cycliste fou
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Voici un raisonnement qui montre les conséquences étonnantes que l'on peut tirer d'un événement banal de la vie quotidienne.
Imaginons un piéton marchant au milieu d'un trottoir et un enfant à vélo qui le suit et le dépasse par la gauche sans l'en avoir averti d'un coup de sonnette ou d'une remarque.
Le piéton sursaute, surpris par le dépassement, et adresse un signe de colère au jeune inconscient.
Mais le calme revenu le pousse à s'interroger sur l'événement.
C'est ainsi qu'il se rend compte que l'avertissement de l'enfant n'aurait été utile qu'à la condition que celui-ci roule lentement ( comment déterminer la vitesse maximale?). En effet, l'avertissement pouvait provoquer une déviation de la direction de marche du piéton. Pour autant que le piéton effectue un mouvement d'écart vers la gauche, et que le cycliste roule trop vite pour l'anticiper, voilà notre piéton et notre cycliste atterrés.
Par contre, si le cycliste ne donne aucun avertissement, lui et le piéton auront tout intérêt à ce qu'il roule très vite pour éviter la collision. En effet, l'absence d'avertissement sonore empêche d'anticiper le possible écart du piéton. Mieux même, elle atténue les risques d'une déviation de la marche du piéton. Le meilleur moyen d'anticiper le possible écart, car une déviation reste possible, le meilleur moyen de prendre en compte cet écart tout à fait aléatoire, consiste à se fixer un côté de dépassement et à le parcourir le plus rapidement possible. La vitesse garantit d'autant plus le succès de l'entreprise de dépassement qu'elle est plus élevée.
Le danger de collision s'amenuise en fonction de l'augmentation du degré de la vitesse de dépassement.
Le risque de collision est inversément proportionnel au degré d'accroissement de la vitesse de dépassement.
Ce qu'il est amusant d'observer dans ce raisonnement, c'est que deux notions de "maîtrise ", de contrôle du danger s'y dessinent dans leur opposition complémentaire. A grande vitesse, c'est par la maîtrise réduite de son véhicule que le cycliste atteint un plus grand contrôle de l'évènement ( ce n'est pas le lieu ici de discuter du problème de l'accroissement de la concentration, donc de la maîtrise du véhicule à grande vitesse ). L'accroissement de la vitesse réduit la capacité de maîtrise du véhicule, mais il est une condition indispensable pour éviter la collision, pour autant bien sûr que le cycliste s'abstienne d'avertir le piéton de sa manoeuvre de dépassement. Donc, à grande vitesse, maîtrise réduite du véhicule, mais grande maîtrise de l'évènement, des possibilités d'accident.
A vitesse réduite, grande maîtrise du véhicule et grande maîtrise de l'évènement. C'est la situation idéale qui reflète la sagesse du pilote. Mais nous savons qu'elle se manifeste rarement dans la réalité. Nous devons donc tenir compte des situations les plus périlleuses, qui sont aussi les plus courantes.
Ainsi observons-nous qu'il y a deux types de maîtrises: une maîtrise du véhicule et une maîtrise de l'événement, grâce à l'anticipation de ce qui peut arriver. Ces deux maîtrises s'excluent l'une l'autre dans le cas de la manoeuvre de dépassement à grande vitesse, mais elles se rejoignent dans le cas du dépassement à vitesse réduite.
le paradoxe du décalage horaire
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Traverser rapidement les fuseaux horaires, passer rapidement d'un fuseau horaire à l'autre, c'est-à-dire parcourir la distance qui sépare deux fuseaux plus vite que ne le fait le soleil à l'horizon, est sans doute le moyen le plus sûr et le plus simple de voyager dans le temps.
Nihil voyage vers l'ouest, Totus vers l'est, au même rythme que le soleil.
Nihil précède toujours le lever du soleil d'une heure. Il est dans la nuit éternelle. Totus progresse au même rythme et dans la même direction que le soleil. Le jour éternel.
Si Totus progresse vers l'est à la vitesse d'un fuseau par heure, il progresse par tranches de deux heures par rapport au temps astronomique. Il est 12h à son point de départ. Il est 13h au fuseau précédent. Si Totus se déplace à vitesse instantanée, il se retrouvera à 13h au fuseau x-1 (x = fuseau de départ). Mais il met une heure. Il y arrivera donc à 14h. C'est bien sûr la même chose pour le fuseau x-2. Il démarre encore à midi, mais il est au même moment 14h au fuseau x-2. Totus voyage pendant 2 heures. Il arrivera donc au fuseau x-2 à 16h.
Si on formalise cette observation, l'heure à laquelle Totus arrive à un nouveau fuseau est donc:
Ha = Hd + tv.2 (heure d'arrivée = heure de départ + temps de voyage x 2).
Vers l'ouest, l'heure est toujours la même: Ha = Hd.
T1 - T2 = 0. Le temps s'arrête vers l'ouest.
Totus semble perdre du temps à voyager vers l'est. Nihil par contre semble en gagner à voyager vers l'ouest. Mais le gain est illusoire. Au décompte final, Nihil perd du temps plutôt qu'il n'en gagne puisque la fatigue provoquée par la nécessité de s'adapter à un nouveau rythme de vie, exige une dépense d'énergie plus élevée que de coutume. Nihil perdra donc du temps à laisser son organisme se rasséréner. Quant à Totus, cette perturbation physiologique s'ajoutera à sa perte de temps dûe au décalage horaire.
les paradoxes de la longévité
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- Qu'entends-tu par paradoxes de la longévité?
- Cette expression est le fruit d'une observation troublante. Je me demandais quelle pouvait être l'explication de la longévité d'une forme d'être. C'est alors que j'ai constaté que les formes d'être les plus simples pouvaient avoir une durée de vie extrèmement courte ou au contraire extrèmement longue. Ainsi le proton semble avoir une durée de vie de plusieurs milliards d'années. Par contre, les particules virtuelles issues de l'océan de Dirac ont une durée de vie qui se réduit à une fraction infinitésimale de seconde, de l'ordre de la femtoseconde. Or le proton n'est pas beaucoup plus complexe que ces particules virtuelles. Pourquoi donc une telle disproportion dans la longévité de ces deux types de particules?
- Je l'ignore. Tu sais sans doute que l'association d'un noyau composé d'un proton et d'un neutron avec un ou plusieurs électrons donne un atome. L'atome le plus simple est l'atome d'hydrogène. Mais l'atome le plus stable est l'atome de fer. Pourtant, il n'est ni le plus simple ni le plus complexe.
Par ailleurs, on entend souvent dire que "les diamants sont éternels". Cela en dit long sur leur longévité. Mais comment expliquer cette longévité?
Dans le monde végétal, certains arbres comme le baobab ou l'acacia sont millénaires. Ils sont très impressionnants. Mais leur majesté n'explique pas leur longévité, elle en est plutôt une conséquence.
Prenons un autre exemple, dans le règne animal cette fois. La tortue est l'animal à la plus grande longévité, mais il est loin d'être le plus grand et le plus complexe.
Einstein, Cléopâtre et le silex
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Il s'agit de vérifier la durée de vie des particules élémentaires et en l'occurence la durée de vie la plus longue. Mais les chances ne sont pas nulles que ces lignes soient composées de certains atomes du cerveau d'Einstein, d'un tyrannosaure, du nez de Cléopâtre, des premiers instants de l'univers ou de la couronne d'épines de Jésus-Christ.
Le chagrin de la Joconde
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A l'inverse, aucune particule n'étant éternelle, il est inévitable que la représentation originale de la Joconde de la main de Léonard de Vinci, disparaîtra tôt ou tard. Toute forme d'être, sans exception, finit par se dégrader. Le sourire énigmatique de la Joconde ne peut défier le temps. Il en sera d'autant plus énigmatique.
Lucky Luke peut-il tirer plus vite que son ombre?
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Oui!
Son mouvement ne peut dépasser, tout comme celui de son ombre, la vitesse de 300000km/s.
Mais comme l'ombre est éloignée de lui, même d'une distance infime, la lumière qui l'environne prend un certain temps avant d'atteindre son objectif. Ce temps, quoiqu'infinitésimal, est suffisant pour créer un décalage entre le mouvement de Lucky Luke et celui de son ombre. Au moment où Lucky Luke dégaine son six coups, son ombre a encore les bras ballants.
Quant à lui, Lucky Tachyon dégainerait, de façon absolue, son six coups plus vite que son ombre.
Si l'ombre précède parfois son modèle en mouvement dans l'espace, elle le suit toujours dans le mouvement du temps.
Lucky Luke, l'homme qui tire forcément plus vite que son ombre!
le paradoxe de l'illusion du réel
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Nihil est un farceur. Il ne peut s'empêcher de taquiner Totus et de l'entraîner dans des aventures loufoques.
En l'occurence il a décidé d'exploiter au maximum les ressources de l'A.R.T.
Il a imaginé une petite expérience qui doit laisser sans voix le
loquace Totus.
La voie à suivre?
Nihil va présenter à Totus un interlocuteur à la hauteur de son inspiration: Einstein. Il va lancer une discussion sur le sujet de prédilection de Totus: "l'utilité de l'art". Musicien averti, Einstein ne doit pas manquer d'idées sur la question.
La conversation entamée, Nihil s'éclipsera. Lui, il ne parlera pas de l'art. Il le mettra à contribution. Il mettra l'A.R.T. à contribution. Il compte utiliser l'Accélérateur et Ralentisseur de Temps pour freiner les mouvements et les pensées des deux interlocuteurs.
Il a convenu avec le vis-à-vis de Totus qu'il simulerait un évanouissement et une chute pendant la conversation.
Puisque les informations véhiculées dans l'univers ne peuvent dépasser la vitesse de propagation de la lumière, vitesse maximum de 300000 km/s; puisque la transmission des informations d'un émetteur à un récepteur n'est pas "instantanée", il existe un décalage entre l'instant où l'émetteur envoie son message et le moment où le récepteur l'enregistre.
Ainsi à chaque instant de notre vie quotidienne, nous percevons la réalité avec un certain retard. Pourquoi ne percevons-nous pas ce retard? Parce que la vitesse de la lumière est si élevée qu'elle nous semble instantanée.
Et le son?
Il est vrai que le phénomène d'écho nous indique un décalage entre le moment d'émission du son et sa réception.
Nihil compte ralentir beaucoup la vitesse de propagation des ondes lumineuses et sonores. Il va la diviser par 100 millions.
La lumière progresse normalement à la vitesse de 300 millions de mètres par seconde. Donc sa nouvelle vitesse, grâce à l'A.R.T., sera de 3m/s. Quant au son, sa vitesse normale est d'environ 1000km/h, soit 300m/s. Sa nouvelle vitesse sera de 0,000003m/s, soit 3 millionièmes de mètre par seconde.
Einstein et Totus sont à 9 mètres l'un de l'autre.
Totus voit Einstein tel qu'il était il y a 3 secondes. Au moment où il dit: "Tu as bonne mine, Albert. Tu respires la santé", Einstein s'écroule. Totus ne s'en rend compte que 3 secondes plus tard. Quant à la remarque de Totus, elle ne parviendra aux oreilles du cadavre d'Einstein qu'environ 1157 ans plus tard. En effet, le son met 100 millions de secondes pour parcourir la distance que parcourt la lumière en 1".
le paradoxe du regard dans le passé
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- Les amoureux des astres connaissent bien ce paradoxe. Ils savent qu'ils ne voient pas l'étoile qu'ils observent telle qu'elle est aujourd'hui, à l'instant où ils la perçoivent, mais telle qu'elle se présentait à l'époque où elle a émis son information lumineuse.
Si l'étoile se situe à une distance de 300000 km, l'astronome observe l'étoile telle qu'elle était il y a une seconde.
Plus la distance augmente, plus l'image que l'on perçoit de l'étoile est vieille, ou plutôt, plus l'étoile dont on perçoit l'image est vieille, ou plutôt plus la lumière qui nous parvient de cette étoile est vieille.
Si l'étoile se situe à 3000000 de km de la terre, sa lumière met 10 secondes à parcourir la distance qui sépare les deux astres.
A 30000000 de km, elle voyagera 100 secondes, c'est-à-dire qu'elle mettra 1'40'' avant de nous atteindre.
Si l'étoile vient d'exploser à l'instant où tu braques ton téléscope sur elle, tu ne pourras pas avoir l'illusion de posséder une arme extraordinaire, mon cher Totus.
Car pendant 1'40'', la lentille de ton téléscope captera l'image d'une étoile rayonnante de santé.
Une fraction de seconde plus tard, un fantastique feu d'artifice illuminera sa rétine.
Si ton téléscope était un puissant rayon lazer capable d'atteindre l'étoile en question, et de la convertir en une myriade d'étincelles, il faudrait compter 3'20'' entre le moment où tu enverrais le rayon destructeur et l'instant où tu pourrais constater son effet dévastateur: 1'40'' pour l'aller et 1'40'' pour le retour.
Il est troublant de se dire que l'on peut "voir" le passé. C'est une conséquence directe du fait que la lumière n'est pas instantanée mais se déplace avec une vitesse limite: 300000km/s.
Jusqu'au calcul du danois Römer en 1675, les hommes de science étaient convaincus que la lumière se propageait instantanémént. A l'instant où l'on allumait la bougie, la lumière atteignait aussitôt n'importe quel endroit autour d'elle, aussi éloigné soit-il.
- Mais pourquoi ne fait-il donc pas aussi clair loin que près de la bougie?
- Parce que l'intensité de la lumière diminue avec la distance. Son intensité, pas sa vitesse.
le téléscope Hubble
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- Que se passe-t-il si l'on oberve l'étoile avec un téléscope plus puissant?
- Tu penses au téléscope Hubble, ce téléscope surpuissant qui a été envoyé dans l'espace pour échapper à la pollution du ciel que constituent les nuages et les ondes électromagnétiques?
- Ce que nous révèle le temps mis par la lumière pour nous parvenir de l'étoile, c'est l'âge minimum de l'étoile. Pour que la lumière voyage pendant 1', 15 ans, 300 ans, 6000 ans, 8 milliards d'années, il faut que l'étoile ait existé il y a au moins 1', 15 ans, 300 ans, 6000 ans, 8 milliards d'années. Mais cela ne veut pas dire que l'étoile se trouvait à une distance de 1', 15 ans, 300 ans, 6000 ans, 8 milliards d'années-lumière de la terre au moment de l'envoi des photons.
- Pour connaître la distance qui sépare l'étoile observée de la terre, de la terre, il faut tenir compte de l'expérience de Michelson & Morley qui a montré que la vitesse de la lumière est indépendante de sa source et de la vitesse de sa source; il faut aussi tenir compte de l'expansion de l'univers.
Si l'univers est statique, et que l'étoile se situe à 4 milliards d'années-lumière de la terre, la lumière mettra 4 milliards d'années pour atteindre la terre.
Si l'univers est en expansion et que la distance entre l'étoile et la terre au moment de l'explosion a doublé au moment où la lumière atteint la terre, la terre et l'étoile s'éloignant l'une de l'autre à une vitesse constante, combien de temps mettra la lumière pour atteindre son objectif?
- La lumière mettra 8 milliards d'années pour atteindre la terre qui s'éloigne, car si la lumière est indépendante de la vitesse de la source, peu importe que son étoile d'origine soit fixe ou en mouvement, elle est sensible à la vitesse de l'objectif, en l'occurence la terre.
T | | | | E BOUM
t2 ------------+ t1
c
T | | | | | | | | E
t2 ----------------------------+ t1
c
- Faux. Tu es tombé dans le panneau. Tu as donné le temps pendant lequel voyagerait la lumière si elle couvrait la distance totale qui sépare l'étoile de la terre. Mais elle ne parcourt que 3/4 de cette distance. En effet, elle parcourt la distance de départ plus la moitié de la distance d'éloignement de l'étoile et de la terre.
t1 BOUM
T | | | | | | | | E
t2 ------------+||||
c
Résultat, la lumière ne voyage pas pendant 8 mais pendant 6 milliards d'années, car par rapport au moment du départ de la lumière de l'étoile, la terre s'est éloignée une fois et demi de la lumière à sa source.
- Cela explique-t-il pourquoi on peut voir une lumière plus vieille que l'étoile qui l'a émise, comme le suggèrent les observations du téléscope Hubble? Une fois partie de l'étoile, la lumière n'a plus rien à voir avec elle. Mais cela suffit-il à justifier ce paradoxe?
- Je ne crois pas. Pour perdre du temps, il faudrait que la lumière fasse des détours. Or elle se propage en ligne droite.
- Oui, mais elle peut être ralentie par les forces de gravitation.
- Même dans ce cas, le temps mis par la lumière pour atteindre la terre, reste une mesure correcte de l'âge de l'étoile qui l'a envoyée. Aux cerveaux de s'agiter!
le paradoxe des âges incompatibles
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- Qu'ont révélé les analyses des résultats des premières observations du téléscope Hubble?
- Que l'univers semble être plus jeune que les étoiles qu'il contient. Ainsi la fourchette traditionnelle de 10 à vingt 20 milliards d'années qui permettrait de déterminer l'âge de l'univers serait ramenée à 8 à 12 milliards d'années. Mais les plus vieilles étoiles ont plus ou moins 15 milliards d'années. Comment donc le contenu pourrait-il être plus vieux que le contenant? Voilà un paradoxe qui attise la réflexion du monde scientifique. Nous allons voir qu'une solution de ce problème passe par la compréhension exacte de l'expression "voir loin, c'est voir tôt", dont les chapitres précédents nous montré comment elle pouvait nous induire en erreur.
big bang et expansion
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Einstein est sans doute le plus grand physicien du vingtième siècle; il est un des pionniers de la physique quantique et il a élaboré la théorie de la relativité. A travers la théorie de la relativité, il a montré que l'espace et le temps faisaient partie d'un continuum à quatre dimensions, c'est-à-dire qu'ils étaient indissociables et qu'ils étaient affectés ensemble par la matière qu'ils contiennent et qu'ils affectent celle-ci en retour: c'est ainsi qu'Einstein a mis en évidence la courbure de l'espace-temps. Mais il est un point sur lequel il s'est trompé: l'état de l'univers. Einstein était tellement convaincu du caractère statique de l'univers, qu'il introduisit dans ses équations une "constante cosmologique" qui annulait l'effet d'expansion de l'univers qu'elles laissaient prévoir. A la lumière des travaux de Friedmann et Lemaître, Einstein reconnaissait qu'il s'était trompé. L'univers était issu de l'explosion d'une singularité initiale appelée plus tard Big Bang. Depuis ce Big Bang, l'univers poursuit son expansion à l'image d'un pudding qui gonflerait indéfiniment. En 1929, l'astronome américain Edwin Hubble donna une confirmation spectaculaire de la théorie de l'expansion de l'univers en constatant le décalage systématique vers le rouge des galaxies. Qu'est-ce que cela veut dire? Les galaxies émettent de la lumière. Le spectre de la lumière est composé de plusieurs fréquences, de l'infrarouge pour la fréquence la plus faible, à l'ultraviolet pour la fréquence la plus forte. Si la lumière qui nous parvient d'un corps tend vers le rouge, c'est que la longueur d'onde de cette lumière augmente, donc que l'objet qui l'émet s'éloigne de nous. Hubble établit ainsi que les galaxies s'éloignent les unes des autres à une vitesse proportionnelle à leur distance. Si l'on parvient à déterminer cette vitesse avec précision, on pourra connaître l'âge de l'univers. En effet, il suffira d'inverser le sens du temps dans les équations pour connaître la date à laquelle toutes les galaxies étaient concentrées en un seul endroit, et donc l'âge de la singularité initiale. C'est ici que nous retrouvons notre téléscope Hubble, du nom bien sûr de l'astronome qui a confirmé la théorie de l'expansion de l'univers. L'analyse des premières observations de ce téléscope permet de déterminer une vitesse d'expansion des galaxies beaucoup plus précise que celle connue jusqu'alors. Cette vitesse d'expansion donne à penser que l'univers serait vieux de 8 à 12 milliards d'années alors que ses plus vieilles étoiles, d'après l'analyse de leurs constituants, doivent avoir 15 milliards d'années.
sphère et privilèges
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Revenons à Einstein. L'enseignement essentiel de sa théorie de la relativité consiste dans l'observation qu'il n'existe pas d'endroit privilégié pour effectuer une observation. Il n'existe pas de lieu absolu, c'est-à-dire un endroit qui serait fixe pour n'importe quel observateur de l'univers. S'il n'existe pas de lieu privilégié, on ne peut déterminer de manière absolue la simultanéité de deux événements. Par conséquent, le temps, la mesure du temps est relative à l'endroit d'où s'effectue l'observation. Même l'accélération, dont le mouvement est considéré comme absolu, peut s'expliquer aussi bien par l'influence de forces de gravitation intenses que par un déplacement de plus en plus rapide dans l'espace. L'observateur dans un référentiel en accélération ne peut distinguer ces deux types d'explication. Cette relativité du temps et de l'espace devait être reliée à une géométrie particulière. C'est la géométrie des courbes et de la sphère. La sphère est le seul volume dont tous les points de la surface sont équivalents, c'est-à-dire qu'il n'existe pas d'endroit privilégié sur la surface d'une sphère. A présent, revenons à notre problème de l'observation des astres.
Que doit voir de l'univers un autre observateur que l'observateur terrestre? Observera-t-il la même vitesse d'expansion des galaxies que nous à partir de la terre? Oui, à une condition: que l'univers soit en expansion uniforme. Si c'est le cas, puisqu'il n'existe pas de point privilégié dans l'univers, un observateur très éloigné de nous fera les mêmes constatations que nous. C'est ce qui explique le fait que nous puissions espérer déterminer l'âge de l'univers alors que nous ne nous trouvons pas au centre de l'univers. D'une certaine façon, tout point de l'univers peut figurer le centre de l'univers. Pour déterminer l'âge de l'univers, il suffira de connaître la distance qui nous sépare des galaxies qui sont le plus éloignées de notre galaxie. On évalue cette distance par l'observation du spectre de la lumière émise par ces galaxies. En calculant le temps qu'il a fallu à ces galaxies pour s'éloigner de la nôtre au point où elles en sont aujourd'hui, on peut déterminer leur âge et par conséquent l'âge de la singularité initiale. C'est bien en ce sens qu'il faut comprendre l'expression: "voir loin, c'est voir tôt".
le passé présent
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Il nous reste à aborder le chapitre le plus cocasse. Nous avons vu qu'il n'y avait pas d'endroit privilégié dans l'univers. La situation de notre galaxie et plus particulièrement de la terre ne diffère pas de celle des autres corps célestes. Imaginons un observateur situé à des millions d'années-lumière de la terre. S'il ne peut observer que la tache que forme éventuellement notre asile dans le ciel de sa planète, il saura que cette tache est celle d'un corps plus ou moins vieux. Sommes-nous le passé du présent de cet extraterrestre? S'il dispose d'un téléscope assez puissant pour lui donner l'impression que la terre se trouve sous son nez, nous verra-t-il nous entretuer en temps réel? Non! Car une image ne se promène pas seule dans l'univers. Les photons n'ont pas de mémoire. Si le soleil brille par son absence huit minutes après qu'il ait explosé, c'est parce qu'il est de la lumière. Par ailleurs, l'extraterrestre constatera que la terre s'éloigne de lui à une vitesse proportionnelle à sa distance. A la suite d'un petit calcul, il évaluera le moment où toutes les galaxies ne devaient former qu'un point, et donc l'âge de l'univers. Surprise! Il constate que l'univers est plus jeune que certaines étoiles.
Qu'en est-il de ce paradoxe lié à l'incompatibilité de la longévité des étoiles avec celle de l'univers?
La première idée qui vient à l'esprit est celle de l'abandon de l'hypothèse de l'expansion de l'univers. Mais alors surgissent d'autres questions. Comment expliquer le décalage vers le rouge systématique du spectre des galaxies? Comment expliquer l'uniformité du rayonnement fossile à 3° kelvin dans toutes les directions de l'espace?
On peut penser aussi que la vitesse d'expansion mesurée n'est pas correcte.
On peut remettre en cause l'âge des étoiles les plus vieilles.
On peut recourir à l'hypothèse des univers-îles et des trous de vers.
le salut
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Une observation fortuite a révélé à Totus l'inattendu.
Totus circulait dans une rame de métro.
Totus était assis dans une rame de métro qui circulait dans des endroits peu fréquentés (ce qui en soi constitue déjà un paradoxe).
Totus était assis sur une banquette d'une rame de métro qui parcourait des quartiers peu fréquentés (ce qui est toujours aussi paradoxal).
La rame a atteint sa vitesse de croisière: une centaine de kilomètres à heure.
Totus regarde défiler les vestiges de la civilisation. Des batîments en ruines, des usines recouvertes de la crasse des fumées crachées par leurs cheminées, des monceaux de ferrailles... Le vertige de la civilisation.
Dans ce décor pétrifié, un homme.
Un homme dont seul le mouvement de la tête témoigne de la vie.
A l'instant où Totus passe à sa hauteur, il constate que l'individu le salue. Il a baissé la tête comme pour lui témoigner une marque de sympathie.
Totus reste perplexe. Par politesse, il a rendu son salut à l'individu, mais il ne se souvient pas l'avoir jamais vu. Pourquoi lui aurait-il donc fait signe?
C'est alors qu'une pensée lui traverse l'esprit. Totus se souvient que l'individu n'a pas pu remarquer son salut puisqu'à l'instant où Totus a baissé la tête à son tour, la rame avait parcouru un peu moins de trente mètres.
L'individu devait se dire que Totus manquait de civilité. Mais, à la réflexion, à l'approfondissement de la réflexion, Totus comprit enfin qu'il s'était mépris sur les intentions de l'individu. Totus ne manquait pas de courtoisie et l'individu ne témoignait pas une sociabilité excessive.
L'individu n'avait pas salué Totus.
Voici ce qui s'était produit.
La rame de métro est lancée à du 100 km à l'heure. Le watman, Nihil, aperçoit l'individu sur le bord de la voie. Il le reconnait et, quelques trente mètres avant d'arriver à sa hauteur, il le salue. Civil, l'individu répond poliment à son camarade en baissant la tête à son tour, mais seulement au moment où Nihil arrive à sa hauteur. Or le temps a passé avec la rame entre ces deux événements. Deux secondes exactement se sont écoulées entre le moment où le watman baisse la tête et celui où l'individu s'exécute. Pas de temps mort!
La seconde doit être convertie en mètres. Cent kilomètres à l'heure équivalent à 100000 mètres à l'heure. Pour connaître la distance parcourue en une seconde, il suffit de diviser 100000 par 3600 (60 minutes x 60 secondes). On obtient environ 30 mètres à la seconde.
Or 30 mètres séparent le watman du siège sur lequel s'est installé Totus.
Donc à l'instant où l'individu effectue un mouvement de tête, Totus est arrivé à son niveau et estime qu'il lui est adressé.
A l'instant où Totus hoche lui aussi la tête, 30 nouveaux mètres ont été parcourus... et une petite vieille dame se demande toujours pourquoi Totus l'a saluée.
A moins qu'elle ne possède quelques notions de physique, ou simplement le don de l'observation et un peu de bon sens.
le paradoxe du temps mort ou l'entre-temps
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- Cher Nihil, je souhaiterais que tu me rendes un service. Vois-tu cette colombe qui bat des ailes dessus nos têtes? J'aimerais que tu immortalises son vol sur la pellicule de ta caméra.
- Je suis heureux de te voir aussi coopératif. Voici enfin venu l'instant où nous nous entendons. Marre des insultes. Crois-tu que cette colombe nous pousse à faire la paix? Quel symbôle.
- La paix! Je n'arrive pas à me concentrer.
- Magnifique volatile Symbôle de paix... du ventre.
- Quelle idée. Que dire de l'homme si tu trouves déjà un si petit être repoussant?
- Cesse de m'embrouiller l'esprit. Le monstre, c'est toi, bien sûr.
- Mais je ne suis pas un homme.
- Mais sans vouloir t'ennuyer, regarde ta colombe. Elle bat de l'aile.
- La voilà qui perd de l'altitude. Elle... elle tombe; elle enterre son existence.
- Mais il faut tenter de la sauver.
- Filme! Tu as obtenu ce que tu voulais: je suis cynique. C'est dans l'air du temps. S'il fallait commencer à sauver le moindre ver de terre qui se tortille sur le chemin après avoir quitté sa terre humide, le temps nous serait compté.
- Elle vient de s'écraser. Tu peux arrêter de filmer et préparer le couvert. De telles émotions ouvrent l'appétit.
- C'est à n'y rien comprendre. Comment as-tu pu soudain devenir aussi cruel? A moins... à moins que tu n'aie trouvé là le moyen d'en finir avec nos sarcasmes. Si tu es plus cynique que moi, comment pourrais-je te piquer, comment pourrais-tu te froisser de mon cynisme?
- Ce n'était pas une question.
- Ce n'est pas une réponse.
- Je sais comment te troubler. Voici le film de la tragédie qui vient de se jouer sous nos yeux. Je te le passe. Admire ce vol grâcieux, l'énergie de cette petite boule de plumes. Soudain, la voilà qui commence à tomber. Que se passe-t-il? Un chasseur l'aurait-il tirée? Une rupture d'anévrisme?
La question est: existe-t-il une image qui montre le passage du vol normal au début de la chute?
- Logiquement oui. J'ai filmé la scène pendant 5' à raison de 24 images par seconde, soit 7200 images pour immortaliser la mort du symbôle de la paix.
- Deux de ces 7200 images doivent figurer le moment exact du passage du vol normal à la chute.
- Je t'arrête! Ces images sont des instantanés pris sur le mouvement. Tu voudrais trouver cet instant précis où la colombe commence à chuter. Or tu as besoin pour cela de deux images. Mais tu oublies que la vitesse du film est arbitraire. Les 24 images par seconde permettent de simuler le mouvement réel, mais en théorie, on peut diviser à l'infini le vol et la chute de la colombe. En effet, aussi proches dans le temps que soient les deux images qui figureront le passage du vol à la chute, il semble que l'on puisse, en théorie, photographier un nombre infini d'instants entre deux images successives. Tu ne pourras donc jamais trouver les deux images qui t'indiqueront le passage exact du vol à la chute.
- D'un point de vue logique, il est vrai que le passage du vol à la chute semble impossible. A la limite, la colombe ne peut pas tomber. Elle ne peut pas mourir, même si les mathématiques ont intégré la notion de passage à la limite. Mais d'un point de vue pratique, ce que tu dis n'est pas tout à fait exact. D'un point de vue pratique, du point de vue de la physique et non plus seulement des mathématiques, on ne peut diviser le temps en dessous de la limite des
qui représentent le temps de Planck.
Cela veut dire que les deux images les plus rapprochées que l'on puisse obtenir sont dans le rapport de
0,0000000000000000000000000000000000000000001 à
0,0000000000000000000000000000000000000000002. Entre ces deux
nombres, il n'y a aucun chiffre. C'est le règne de l'informe, donc du non mesurable. La science est très loin de pouvoir atteindre de telles limites. Mais de toute façon, il semble paradoxal de vouloir matérialiser 1 instant à travers 2 clichés. C'est sans doute là que se cache la contradiction. Il faut admettre que le "tout vaut plus que ses parties", du moins que les parties que nous lui imposons. Ainsi, le temps du passage du vol à la chute vaut plus que les deux images censées le représenter. Le temps, identifié au mouvement, vaut plus qu'une somme d'instants.
- Un instant est un temps-mort! Et en effet, comme nous l'avons vu tout au long de ces chapitres, le langage de la logique et plus généralement des mathématiques nous permet de découper le réel, mais il ne nous permet pas de le recréer. Il nous donne une illusion de réel. Et pour cause, il y a une différence de dimension. La représentation mathématique se fait au mieux en 2 dimensions alors que le réel en compte 3! C'est une erreur de vouloir recréer le réel à travers le langage, de croire pouvoir ainsi parfaitement le maîtriser ou le refléter.
- On ne peut mieux illustrer ce que tu dis qu'à travers une variante intéressante du problème que nous venons d'étudier: celui du "commencement" du temps, ce paradoxe des paradoxes.
Imaginons Dieu avec sa caméra. Il filmerait cet instant où le temps, c'est-à-dire l'espace-temps, apparaît. Car il a bien dû se produire, ce moment où le temps a commencé à s'écouler.
- Mais comment peux-tu parler de moment sans référence à rien? Comment ce moment pourrait-il être un instant comparable aux autres? C'est un instant singulier qui ne fait pas encore partie du temps et qui ne fait plus partie du néant.
- C'est à devenir fou. Cela signifierait-il que le temps n'a jamais commencé? Si cet instant qui n'en est pas encore un contredit le principe de non-contradiction et remet en cause la loi de dualité...
- Les principes de la logique sont les suivants:
l'identité: p = p dit qu'une chose est égale à elle-même.
le tiers-exclu: p ou -p dit qu'il n'y a rien en dehors d'une chose ou son contraire.
la non-contradiction: -(p et -p) dit qu'on ne peut avoir en même temps une chose et son contraire.
la loi de dualité: p et -p dit qu'une chose et son contraire ne peuvent avoir la même valeur en même temps. C'est une variante du principe de non-contradiction.
- Revenons à notre instant initial. En tant qu'instant hors de la ligne du temps, il contredit le principe du tiers-exclu. Il est un instant et il n'est pas un instant. Cela signifie, soit que la logique n'est pas adaptée au réel, soit que le temps a toujours existé, donc que le monde, l'être a toujours existé, et qu'il est vain, et même absurde, de vouloir retrouver son origine. Mais il semble que nous n'ayons pas assez d'humilité pour l'admettre.
- On retrouve ici les paradoxes de Zénon et Parménide. C'est d'ailleurs le même paradoxe, celui de Zénon et celui de Parménide. Zénon a conçu ses paradoxes pour illustrer ceux de son maître. Parménon et Zénide.
- L'instant du passage serait réduit à un temps-mort! D'où la contradiction.
- Cela veut dire que le mouvement nous dépasse infiniment. D'une certaine façon, le mouvement est l'actualisation de l'infini, du vide, de l'impossible.
- La logique ne semble en effet pas adaptée au réel. Le paradoxe est d'autant plus stupéfiant que la découverte que l'univers a une histoire, puisqu'il serait issu du Big Bang, et la découverte de l'évolution de la matière du simple vers le complexe, nous poussent à croire qu'il y a eu un début du temps.
En résumé, voici le paradoxe le plus fabuleux que l'on puisse concevoir:
ETRE > NON-ETRE
ETRE > NON-ETRE
ETRE > NON-ETRE
ETRE > NON-ETRE
ETRE > NON-ETRE
ETRE > NON-ETRE
ETRE >...
L'être, ou le temps, provient du non-être ou de l'être. Il semble impossible que quelque chose vienne de rien. L'être vient donc de l'être. Mais cet être même doit venir de l'être et ainsi de suite à l'infini.
On peut verser une larme de tristesse et de joie devant ce spectacle stupéfiant.
le calendrier chrétien et l'âge de jésus
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Notre calendrier a établi comme origine, comme point 0, la naissance du Christ. Or tout le monde sait que l'anniversaire de la naissance de Jésus se fête le 25 décembre, soit 6 jours avant l'an 0 que cette naissance est censée situer. Mais il y a mieux. Depuis quelques années, les historiens sont convaincus, sur la base de l'analyse de textes authentifiés, que le Christ est né 6 ans avant l'an 0. On est certain par ailleurs qu'il est mort sur la croix en 30 de l'ère nouvelle. Jésus serait donc mort à 36 ans et 6 jours et non à 33 ans.
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